La Rationalisation du parlementarisme sous la Ve République
écrit le: 30 mai 2020 par adminmodifié le 31 mai 2020
- Sommaire:
- 1 Pourquoi la Rationalisation du parlementarisme
- 2 La dénonciation du parlementarisme rationalisé
- 3 Faut-il supprimer la rationalisation du parlementarisme
- 4 Les moyens de la rationalisation
- 5 Vidéo : La Rationalisation du parlementarisme sous la Ve République
Pourquoi la Rationalisation du parlementarisme
Sous les IIIe et IVe républiques, le régime parlementaire a connu des dysfonctionnements traduits par les renversements intempestifs du gouvernement. L’inexistence d’un paysage politique structuré, n’a pas permis de faire apparaître clairement et systématiquement un parti majoritaire et un parti minoritaire, qui se disputaient régulièrement le pouvoir. Les coalitions majoritaires au Parlement n’ont cessé de se disloquer, obligeant les gouvernements à démissionner puisqu’ils ne pouvaient obtenir le vote des lois nécessaires à la mise en œuvre de leur politique. Pour remédier à cette situation, les rédacteurs de la Constitution de 1958 ont donné au gouvernement des instruments efficaces lui permettant de s’imposer au parlement. Il a donné au gouvernement des moyens efficace pour légiférer en l’absence d’une majorité qui le soutient. Le parlementarisme rationalisé est un ensemble de techniques de droit constitutionnel et électoral qui vise à éviter une trop grande instabilité gouvernementale dans un régime parlementaire. La rationalisation conduit souvent à souligner l’impuissance du parlement et à s’interroger sur le caractère démocratique de ces procédures.
La dénonciation du parlementarisme rationalisé
Son caractère excessif a toujours été critiqué, on peut s’interroger sur l’utilité de la représentation parlementaire si son rôle est limité à l’enregistrement d’un travail législatif qui lui échappe largement. La dénonciation s’est traduite par différentes propositions qui avaient pour objectif de permettre au Parlement de contrôler davantage le gouvernement. Notamment la réforme de 2008 a permis la modification des règles de fixation de l’ordre du jour et du délai d’examen des textes. Le gouvernement ne domine plus l’ordre du jour, depuis cette réforme. Deux semaines de séance sur quatre réservées par priorité à l’examen des textes et aux débats dont le Gouvernement demande l’inscription à l’ordre du jour (les lois de finances, par exemple). Une semaine de séance sur quatre réservées par priorité au contrôle de l’action du Gouvernement et à l’évaluation des politiques publiques. Un jour de séance par mois réservé à l’initiative des groupes politiques d’opposition.
La rationalisation du parlementarisme affaiblie le parlement et le place au service et sous la surveillance du gouvernement. Elle permet au pouvoir exécutif d’être constamment présents sur le parcours d’une loi et fait perdre au parlement sa souveraineté. De plus le régime parlementaire de type présidentialiste fait que l’orientation politique, qui commande l’action du législateur, est définie par le président de la République car sa légitimité politique s’impose à celle du Parlement.
Faut-il supprimer la rationalisation du parlementarisme
Sous la Ve République, les gouvernements ne sont plus renversés à l’Assemblée nationale. Une seule motion de censure a été adoptée depuis 1958. L’existence d’une majorité parlementaire qui soutient le gouvernement durant toute la législature a permis la stabilité gouvernementale, ainsi le recours aux différents instruments du parlementarisme rationalisé peut paraitre inutile. En revanche en cas de disparition du fait majoritaire, l’adoption des projets de loi deviendra de plus en plus incertaine, et le gouvernement aura certainement recours aux moyens de rationalisation pour légiférer et faire face au parlement notamment en utilisant l’article 49.3 pour imposer le vote des projets de loi et en orientant le travail du parlement grâce à la maitrise de l’ordre du jour, il peut éviter la censure des gouvernements grâce au principe de la « confiance présumée », etc. Ainsi la rationalisation peut jouer un rôle non négligeable lorsque le fait majoritaire s’estompe. Ainsi il est préférable de l’atténuer pour éviter l’effacement du parlement que de la supprimer totalement si l’on veut préserver la stabilité gouvernementale.
Les moyens de la rationalisation
Il en est ainsi en ce qui concerne son organisation :
– les assemblées ne siègent plus quand elles le veulent mais seulement en deux sessions ordinaires de trois mois chacune par an.
– le règlement intérieur de chaque assemblée (comme d’ailleurs, celui du Congrès) est contrôlé par le Conseil constitutionnel (par opposition au principe traditionnel de l’autonomie interne des parlements).
– l’ordre du jour de leurs travaux est déterminé en priorité par le Gouvernement (en pratique, cette priorité a rapidement confiné à un quasi-monopole).
– les assemblées ne peuvent s’organiser comme elles le veulent : la Constitution limite à six le nombre de leurs commissions permanentes et le statut comme les pouvoirs des commissions d’enquête sont très limités (par une loi initialement élaborée par le gouvernement.
De même, quant à leurs actes et décisions, les assemblées représentatives ne peuvent s’exprimer qu’à travers des procédures strictement limitées :
– en matière législative, les assemblées conservent certes la compétence de proposer la loi (mais ces propositions sont soumises à de strictes limitations quant à leur recevabilité matérielle et financière), de la discuter et de l’adopter mais le Gouvernement dirige, grâce à diverses prérogatives, l’essentiel de la procédure législative (sans compter qu’il détient un pouvoir réglementaire plus large qu’auparavant)[36].
– le Gouvernement peut engager, à l’Assemblée nationale, sa responsabilité politique sur le vote de tout texte de loi (art. 49, al. 3) afin de forcer les députés à ne pas s’opposer à ses projets sinon au prix de la chute du gouvernement.
– les assemblées ne peuvent plus voter de résolutions sur la politique générale.
– la fonction élective du Parlement n’est plus reconnue positivement : le Gouvernement, nommé par le Président (art. 8), n’a pas besoin d’une investiture ni d’un vote de confiance de l’Assemblée nationale ; celle-ci peut seulement prendre l’initiative de voter une motion de censure contre lui (art. 49). Le principe de la « confiance présumée » est ainsi consacré.
Le Premier Ministre, après délibération du Conseil des Ministres, engage devant l’Assemblée nationale la responsabilité du gouvernement sur son programme ou éventuellement sur une déclaration de politique générale. Art 49.al.1
L’initiative est réservée au Premier ministre et au Conseil des ministres.
En faisant du Premier ministre, le seul organe apte à engager la responsabilité du gouvernement on n’innove pas, puisque c’était déjà le cas sous la IVe République, mais on veut renforcer sa position face au gouvernement pour en faire le véritable Chef du gouvernement. Par-dessus tout, on veut éviter les engagements de responsabilité intempestifs, trop fréquents sous la IIIe.
Toutefois, l’engagement n’est possible que dans la mesure où le Conseil des ministres a ratifié la décision. Là encore on retrouve une disposition qui existait déjà. Elle marque la même volonté de donner un caractère solennel à la décision et de faire jouer la solidarité gouvernementale.
– enfin, on notera que les députés ou sénateurs entrant au gouvernement cessent d’exercer leur mandat parlementaire et ne le retrouvent pas automatiquement en quittant leurs fonctions (art. 23 et 25 C). Cette mesure de rupture avec la tradition française et l’esprit du gouvernement parlementaire était conçue pour éloigner culturellement les ministres des assemblées.
Finalement le rôle des assemblées est assez limité
– discuter et voter la loi (art. 45), les propositions de loi ne représente que 20% de l’ensemble l’initiative législative.
– poser des questions écrites et orales aux ministres, sans conséquence juridique (art. 48).
– voter une motion de censure contre le Gouvernement (art. 49, al. 2).