Les sources du droit : L'État de droit
L’expression « Etat de droit » qui est employée aujourd’hui de manière assez floue est utilisée ici pour décrire un système dans lequel le primat du politique sur le juridique a pour limite les droits de l’homme ou les droits fondamentaux des citoyens.
Depuis la Seconde Guerre mondiale ont été mises en place, dans de nombreux Etats (notamment l’Allemagne et l’Italie, Etats de l’Axe), des cours constitutionnelles chargées de censurer des lois qui seraient contraires aux droits fondamentaux.
Pour cela, il a fallu que les nouvel¬les constitutions de ces Etats contiennent un catalogue de droits fonda¬mentaux. En France, la Constitution de 1946 (IVe République) n’a pas mis en cause le primat de la loi au nom du respect de la souveraineté nationale. Celle de 1958 (Ve République) met en cause la souveraineté législative non pas sur le terrain de la protection des droits fondamen¬taux, mais sur celui du renforcement du pouvoir exécutif voulu par le général de Gaulle.
Ce n’est qu’en 1971 que le Conseil constitutionnel a bouleversé la donne (décision Liberté d’association du 16 juillet). En effet, en contrôlant désormais la conformité de la loi au préambule de la Constitution de 1958, les « sages » intégraient dans la Constitution lato sensu des textes qui portent sur les droits fondamentaux des Français : la déclaration de 1789, le préambule de 1946 (qui contient des droits économiques et sociaux) et les « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République » qui concernent les grandes lois libérales des débuts de la IIIe République (notamment celle de 1901 sur la liberté d’association). Désormais, les lois voulues par la représentation nationale ne sont conformes à la Constitution que si elles respectent les droits fondamentaux reconnus par cette dernière.
S’agit-il d’un retour en force d’une conception selon laquelle le droit prime sur le politique ? La réponse peut être positive si l’on pense que ces droits fondamentaux sont immuables, éternels, inscrits dans la nature (de l’homme).
La réponse sera négative si l’on pense que ces droits fondamentaux sont en réalité non pas inscrits dans la nature humaine, mais une affirmation des convictions de ceux qui croient au libéralisme politique et dont les vues sont dominantes aujourd’hui. Bref, les droits fondamentaux n’appartiendraient pas à l’homme in abstracto et ne seraient nullement universels, mais seraient le produit d’une pensée occidentale, île surcroît datée. Dans ce cas, la conception volontariste du droit existerait bien, elle serait simplement dissimulée derrière un discours universaliste.
Chacun peut être convaincu par l’une ou l’autre de ces réponses. Mais une chose est certaine, si les droits fondamentaux sont en réalité des actes de volonté et de pures créations humaines, ceux qui les défendent (ont le jeu d’une conception du droit dans laquelle le juridique prime sur le politique, le juge sur le gouvernant, le droit sur la loi. Et ainsi, tandis que la démocratie entendue comme l’Etat de droit progresse, la démocratie entendue comme la souveraineté du peuple régresse.