Loi applicable : Mise en œuvre de la règle de conflit
La mise en œuvre des règles de conflits pose un certain nombre de problèmes théoriques et pratiques. Deux d’entre eux doivent être soulignés.
1. Question des qualifications
Pour pouvoir appliquer la règle de conflit, l’autorité saisie doit avant tout qualifier la situation qui lui est soumise. En fonction de quelle loi cette qualification doit-elle être opérée ? Il est admis qu’à ce stade du raisonnement, la qualification se fait lege fori, à savoir en fonction des concepts et des catégories juridiques de l’autorité saisie. Ces concepts et catégories s’inspirent du droit interne, mais doivent être adaptés à la spécificité des relations internationales ; en particulier, les catégories doivent être élargies pour « comprendre », dans les différents sens du terme, certaines institutions étrangères qui seraient ignorées du droit interne ou dont les contours ou la substance juridiques seraient différents. Ainsi, faut-il étendre la qualification de mariage aux unions homosexuelles célébrées à l’étranger ? Cet effort d’adaptation est parfois très complexe : comment faire entrer par exemple le trust anglo- saxon dans les catégories françaises, fussent-elles élargies ?
Si la qualification initiale permet de déterminer la loi applicable, il conviendra, pour appliquer la loi étrangère ainsi désignée, d’utiliser les concepts et les catégories de cette loi : les qualifications se feront alors lege causae.
2.Question du renvoi
Lorsque la règle de conflit donne compétence à un système juridique étranger, cette désignation vise-t-elle uniquement les règles matérielles contenues par ce système ou doit-on prendre aussi en considération ses règles de conflits ? En particulier, si le système juridique n° 2 désigné par la règle de conflit du système n° 1 ne se veut pas compétent, et renvoie la compétence au système n° 1 (renvoi au premier degré) ou à un système n° 3, faut-il prendre en compte cette désignation ?
Soit par exemple une question relative au statut personnel d’un Anglais domicilié en France : selon la règle française de conflit, est compétente la loi anglaise, en tant que loi nationale ; mais selon la règle anglaise de conflit, est compétente la loi française, en tant que loi du domicile.
Faut-il appliquer une loi qui « ne se veut pas compétente » ou tenir compte, dans la mesure du possible, de la désignation opérée par le système juridique étranger ?
I a question du renvoi a fait l’objet de nombreux débats et donné naissance à de nombreuses théories. Le souci de coordonner entre eux les systèmes juridiques permet de justifier aujourd’hui son admission en France comme dans de nombreux systèmes.