Autres courants
D’autres courants de pensée, parfois aux confins de diverses catégories du savoir, animent aussi notre temps. Ils ne sont pas sans incidence sur l’évolution de la philosophie du droit. Ainsi en est il de l’existentialis. Plus nette est ou pourrait être l’influence de la psychanalyse ou du structuralisme.
Les relations entre la psychanalyse et le droit appellent, plus que par le passé, l’attention des juristes, ce qui les conduit non seulement à élargir à ce sujet l’éventail des sciences auxiliaires du droit, à partir de la psychologie, mais aussi à tenir compte des recherches psychanalytiques, notamment de celles de Freud (1856- 1939), pour renouveler l’étude de l’appréhension des règles (de droit pénal, de droit civil, etc.), voire du système, ainsi que l’analyse des comportements face à l’obligatoire en forme de droit.
Pouvant se relier les unes et les autres à l’idée que, de l’appartenance à un ensemble, découlent, pour chaque partie de cet ensemble, plusieurs caractères, les diverses maisons du structuralisme ne sont pas indifférentes à la philosophie du droit, en raison des relations qui existent dans les ordonnancements juridiques, ainsi qu’entre les mots et les signes par lesquels se manifestent les règles de droit.
Un puissant courant de pensée tend de nos jours à renouveler, voire à ressusciter, la réflexion philosophique sur les relations entre le droit et la justice, individuelle ou sociale 3. Cette orientation salubre a été principalement illustrée par l’œuvre fondamentale d’Hayek, Droit, Législation et Liberté (1973) 4. Contestant la notion même de justice sociale, Hayek a mis en évidence les limites du pouvoir de légiférer d’opportune et efficace manière et l’importance de l’ordre spontané des sociétés humaines.
Dans le même ordre d’idées, on doit retenir l’importance des grands courants de la philosophie du droit aux Etats-Unis. Ils ont contribué puissamment à une réhabilitation de la philosophie pratique, non sans manifester, quant au role de la société global, de l’état et du droit, des conceptions diverses, parfois nettement antagonistes.
Ainsi, dans un livre appelé à un grand retentissement A Theory of lustice (1971) , John Rawls tend à relever le grand défi des sociétés modernes : il se propose de concilier la liberté individuelle et ce qu’on appelle la justice sociale. A la recherche d’une correspondance en his¬toire de la philosophie, on a évoqué Kant: celui-ci a voulu fonder rationnellement le libéralisme; John Rawls s’attache à fonder la social-démocratie par opposition tant au socialisme qu’au libéralisme social . A l’inverse, suivant une tradition qui doit beaucoup à Locke, Kobert Nozick a préconisé un retour aux principes du libéralisme constitutionnel; son grand livre, Anarchy, State and Utopia (1974) , manifeste l’influence de l’ultra libéralisme économique qui tend à ramener l’Etat à son rôle de « veilleur de nuit » tel qu’il était conçu dans la théorie du libéralisme classique.