Effets des actes juridiques: les effets des actes juridiques
Présentation
L’acte juridique oblige la personne de qui il émane. Du moment que sa volonté s’est exprimée dans les conditions prévues par le droit, elle est liée. Encore convient-il de distinguer les effets des actes unilatéraux, des conventions et des actes collectifs.
Effets des actes unilatéraux
Lorsque les conditions de l’acte unilatéral sont réunies, cet acte entraîne à l’égard de son auteur des effets de droit. Il ne saurait avoir à l’égard des tiers un effet obligatoire, c’est-à-dire notamment les rendre débiteurs. En outre, en droit privé français, on répugne traditionnellement à admettre que, sauf exceptions, l’acte unilatéral d’une personne puisse entraîner à sa charge un engagement à l’égard des tiers. La question n’en prête pas moins à controverse . Reste que l’acte unilatéral, en ce qu’il modifie une situation juridique, est de nature à créer une situation opposable aux tiers.
En droit administratif, les effets de l’acte unilatéral sont plus forts. Dans un très grand nombre de cas, cet acte prend la forme d’une décision exécutoire qui non seulement modifie l’ordonnancement juridique existant, mais produit un effet de contrainte (v. infra, n° 605). Ainsi la nomination d’un fonctionnaire entraîne à l’égard de celui-ci des droits et des obligations, l’Administration étant, de son côté, obligée de 1’« installer ».
Effets des contrats
II est important de distinguer à ce sujet les effets des contrats de droit privé et des contrats administratifs.
Effets des contrats de droit privé
Le système du code civil s’ordonne à partir de l’article 1134, qui pose, dans son alinéa 1er, le principe de l’effet obligatoire du contrat : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites », c’est-à-dire aux parties au contrat. Celles-ci sont liées par son caractère obligatoire et tenues de respecter leurs obligations, même lorsque des circonstances imprévues, bouleversant leurs prévisions, entraînent après coup une disproportion très importante de leurs prestations réciproques (rejet de la théorie de l’imprévision). A vrai dire, dans la pratique, des clauses contractuelles préviennent généralement les conséquences de semblables bouleversements. En outre, on a vu s’atténuer, du fait d’interventions diverses du législateur, l’effet radicalement obligatoire du contrat. Reste qu’en principe, le juge ne peut modifier les clauses d’un contrat et que, sauf disposition contraire et sous réserve de l’ordre public, les lois nouvelles ne modifient pas le régime juridique des effets des contrats en cours (v. infra, nos450 s.).
A l’égard des tiers, les solutions découlent de l’article 1165 du code civil : « Les conventions n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes; elles ne nuisent point au tiers, … ». Tel est l’effet relatif du contrat. Dire qu’un contrat produit effet à l’égard de telle personne, cela signifie qu’elle devient, par ce contrat, créancière ou débitrice^ d’une obligation. Envisagé au point de vue des tiers, le principe de l’effet relatif du contrat permet d’affirmer qu’un tiers ne peut être rendu créancier ou débiteur par l’effet d’un contrat auquel il n’a pas été partie. Mais un contrat, bien qu’il ne puisse lier un tiers, est une réalité dans le monde social ; il existe erga omnes, il est opposable à tout le monde. Ainsi, lorsqu’un entrepreneur engage une personne qui est encore liée par un contrat de travail passé avec un autre employeur, sa responsabilité peut être mise en cause ; le premier contrat de travail lui est opposable et il ne peut agir au détriment des intérêts de l’autre employeur.
Effets des contrats administratifs
L’on est porté à faire état, à leur sujet, d’une situation d’inégalité. Parce que l’acte juridique se relie au fonctionnement d’un service public ou du fait des clauses exorbitantes qu’il comporte, l’Administration dispose de pouvoirs importants : l’exécution du contrat s’opère sous sa surveillance et son contrôle; et elle est même investie à ce sujet d’un certain pouvoir de direction. L’Administration est en outre dotée d’importants pouvoirs de sanction, ainsi que d’un pouvoir de modification unilatérale des prestations dues par son cocontractant ce qui s’accompagne pour celui-ci, en contrepartie, d’un droit à indemnisation, ainsi que d’un pouvoir de résiliation du contrat. On ajoutera que les exigences de la continuité du service public ont entraîné, au sujet du contrat administratif, l’admission de la théorie de l’imprévision, qui a été rejetée au sujet des contrats de droit privé.
Il n’est guère douteux que, de plus en plus, une analyse comparée des effets des obligations y compris extracontractuelles manifeste, par un dépassement de la distinction du droit privé et du droit public (supra, nos 88 s.), l’importance des fondamentaux de l’obligation. Aussi bien a- t-on fait récemment état de « ce qu’un exposé transposé du droit des obligations apporterait à la réflexion de droit administratif ».
Effets des actes collectifs
Pour plusieurs raisons, les actes collectifs s’accordent mal avec l’effet relatif des actes juridiques. Dans leur genèse même, toutes les fois qu’ils prennent la forme d’une délibération, et à moins que l’unanimité ne soit exceptionnellement requise, le jeu de la loi de la majorité permet, à certaines conditions et dans certaines limites, à celle-ci d’imposer ses décisions à la minorité .
En outre, même lorsqu’il ne s’agit pas de délibérations de groupe assemblées, conseils, etc. l’acte collectif est souvent marqué par une vocation à l’extension de ses effets à d’autres personnes que celles qui ont, par elles-mêmes ou par leurs représentants, participé à l’élaboration de l’acte. Le régime des conventions collectives de travail est, à ce sujet, très révélateur, le processus normatif permettant d’étendre, dans certaines conditions, par voie administrative, la convention de branche ou l’accord professionnel ou interprofessionnel, leurs avenants ou annexes (art. L. 133-1 s., c. trav.). V. supra, nos 250, 276.