Le droit fiscal : Le système fiscal français
Fruit d’une lente évolution, le système fiscal français se caractérise à la fois par le profond déséquilibre qui existe entre ses composantes (revenu, dépense, capital), et par une certaine inégalité dans la répartition de la charge fiscale qui peut accréditer chez d’aucuns l’idée d’une injustice. Pour la clarté du propos, il est nécessaire d’envisager d’abord les impôts perçus par l’Etat, puis les impôts perçus par les collectivités territoriales, et enfin d’en montrer les principales caractéristiques.
1. Les impôts d’État
Leur présentation impose de reprendre la classification économique déjà évoquée (revenu, dépense, capital).
Les impôts sur le revenu sont dissociés en deux catégories : d’une part l’IR classique, qui a une assiette relativement étroite, auquel se rattache l’impôt sur les sociétés (IS) ; d’autre part deux contributions récentes, à l’assiette beaucoup plus large, à savoir la contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS).
L’impôt sur le revenu est payé par les personnes physiques résidant en France, quelle que soit leur nationalité.
Il frappe la totalité des revenus qu’elles perçoivent (salaires, honoraires, bénéfices tirés des activités industrielles et commerciales, revenus fonciers…), après déduction des dépenses engagées en vue de leur acquisition et de leur conservation.
Les revenus sont retenus dans le cadre du foyer fiscal, qui correspond à la famille (parents, enfants), ce qui conduit à la personnalisation de l’impôt (système du quotient familial). L’IR est un impôt progressif par tranches, dont le taux varie de 0 à 40 %.
L’IS frappe les bénéfices réalisés par les sociétés de capitaux (sociétés anonymes, sociétés à responsabilité limitée…). Le bénéfice est glo¬balement constitué par la différence entre le bilan de clôture et le bilan d’ouverture. Il correspond au résultat comptable, mais ce der¬nier fait l’objet de rectifications en raison de l’existence de règles fiscales qui dérogent aux règles comptables. Le taux normal de l’IS est de 33,33 %.
A côté de ces deux impôts figurent des contributions sociales complémentaires de l’IR, dont la particularité est qu’elles sont affectées non pas à l’État, mais à la nébuleuse qu’est la Sécurité sociale. Il s’agit de la CSG (créée en 1991) et de la CRDS (créée en 1996). Ces contributions ont une assiette très large, beaucoup plus large que celle de l’IR. Elles frappent trois types de revenus : les revenus d’activité et de remplacement, les revenus du patrimoine et les placements à revenu fixe. Sont assujetties à ces contributions toutes les personnes physiques fiscalement domiciliées en France.
Ces deux contributions sont associées à un prélèvement social de 2 %, dont l’assiette est moins large puisqu’il ne frappe pas les revenus d’activité et de remplacement. La particularité de cet ensemble de prélèvements sociaux réside dans le fait qu’ils font pour l’essentiel l’objet d’une retenue à la source, opérée par les employeurs et les établisse-ments financiers. Si l’on additionne leurs taux, on aboutit à un taux global de 10 %… ce qui en fait des impôts très rentables.
La dépense est imposée sous deux formes : d’une part, un impôt général (laTVA), d’autre part des droits indirects. Les impôts sur la dépense ont été harmonisés entre les Etats membres de l’Union européenne, pour éviter les distorsions de concurrence auxquelles de tels impôts pouvaient conduire.
La TVA constitue la principale recette de l’État. Elle frappe toutes les opérations de ventes de biens ou de services (à l’exception des activités médicales) et est supportée par l’acheteur final, c’est-à-dire le consommateur. Ainsi, l’achat d’un livre comprend le prix du livre proprement dit, auquel s’ajoute le montant de la TVA, qui doit figurer sur la facture (prix TTC) que reçoit le client.
La TVA est en conséquence collectée par le vendeur, c’est-à-dire le commerçant, qui sera chargé de la reverser au Trésor public. Mais, et c’est là la pièce maîtresse du mécanisme instauré, ce même commerçant peut déduire de la TVA qu’il a collectée la TVA qu’il a lui-même payée lors d’achats effectués pour exercer son activité, en l’espèce celle de libraire (achats de rayonnages, de présentoirs, d’électricité…). Ce mécanisme ingénieux assure la neutralité économique de cette taxe sur le chiffre d’affaires.
Les droits indirects (appelés encore droits d’accise) sont des impôts sur la consommation qui se surajoutent à la TVA. Ils sont justifiés tant par des raisons historiques que par des objectifs économiques ou sociaux. On peut citer, à titre d’exemple, les droits sur les alcools, sur les tabacs et sur les huiles minérales, parmi lesquels on trouve la célèbre taxe intérieure sur les produits pétroliers, ouTIPP.
Enfin, l’imposition du capital est en France plutôt plus lourde que dans la plupart des autres pays d’Europe. Elle peut prendre deux formes : les droits d’enregistrement et l’impôt sur la fortune.
Les droits d’enregistrement sont des impôts exigibles occasionnellement, lors de la rédaction de certains actes : ouverture d’une suc¬cession, donation, ventes d’immeuble, création de société… Le patrimoine est alors imposé lorsqu’il est transmis à titre gratuit
(donation, succession) ou lorsqu’il est transmis à titre onéreux (vente d’immeuble, création ou augmentation de capital d’une société…).
L’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) est, quant à lui, annuel. Il est dû par les personnes physiques qui sont propriétaires d’un patri¬moine (biens meubles et immeubles) dont la valeur nette excède un certain montant, fixé à 760 000 € pour 2007. Son taux, progressif par tranches, s’étend de 0 à 1,8 %.
2. Les impôts locaux
Il s’agit de quatre contributions issues de la Révolution française et toujours en vigueur, avec maintes adaptations. De là leur nom de Quatre Vieilles. Très critiquées, car assises davantage sur des indices (valeur locative cadastrale, qui est le rendement théorique d’une pro¬priété évalué par l’Administration) que sur des valeurs économiques, ces taxes n’en continuent pas moins d’être pérennisées, parce qu’elles alimentent les caisses des collectivités territoriales (commune, département, région).
La taxe professionnelle est l’impôt local qui a le plus grand rendement. Elle est due par les personnes physiques (professions libérales) ou morales (sociétés) qui exercent en France, à titre habituel, une activité professionnelle non salariée.
La taxe d’habitation est due par toute personne qui occupe, au janvier de l’année d’imposition, un local d’habitation dans la commune.
La taxe foncière se subdivise en deux éléments : la taxe foncière sur les propriétés bâties, qui est due par les propriétaires d’immeubles bâtis (constructions élevées au-dessus du sol) situés en France ; et la taxe foncière sur les propriétés non bâties, qui est due par les propriétaires de terrains non construits.
3. Les principales caractéristiques
Hormis les droits d’enregistrement qui ne sont perçus qu’à l’occasion de certains événements, tous les impôts évoqués sont perçus tous les ans (principe d’annualité de l’impôt).
Tous les impôts susvisés sont des impôts déclaratifs, en ce sens qu’ils font l’objet d’une déclaration de la part de l’assujetti, tel qu’il est défini par la loi. Bien évidemment, cette déclaration est contrôlée par l’admi¬nistration fiscale, le tout sous la surveillance du juge de l’impôt.
Il est important de noter que le système fiscal décrit a tendance à se rapprocher des systèmes fiscaux étrangers, et cela sous une double influence :
- l’influence de l’Union européenne, qui a réalisé partiellement l’harmonisation des impôts sur la dépense ;
- l’influence des relations internationales et des échanges internationaux, qui ont conduit l’État français à conclure avec près de cent Etats des conventions fiscales bilatérales destinées à éviter la double imposition (imposition par la France et par un autre Etat)