Droit administratif : L'Administration décentralisée
L’administration décentralisée résulte d’un mouvement qui s’est développé progressivement depuis 1832 jusqu’à nos jours.
- Les conseils consultatifs placés par Bonaparte auprès du maire (conseil municipal) et du préfet (conseil général) sont élus et non plus nom¬més, puis dotés de compétences, dont celle de voter un budget.
- En 1871 pour le département et en 1884 pour la commune, ces conseils élus deviennent des organes décisionnels de personnes morales distinctes de l’État, dotées de compétences et de ressources propres et d’un budget spécifique.
- En 1982, les lois de décentralisation érigent les régions en collectivités territoriales et élargissent les compétences propres des départements et des communes.
Il existe en outre des collectivités d’outre-mer à statut spécifique. Parallèlement sont créées de nouvelles personnes morales de droit public non territoriales : les établissements publics dotés de compé¬tences propres.
Ainsi, une décentralisation dite fonctionnelle complète la décentralisa¬tion territoriale.
1. La décentralisation territoriale
La décentralisation territoriale repose sur la libre administration des collectivités territoriales énoncée par l’article 72 de la Constitution : « les collectivités territoriales de la République sont les communes, les départements, les régions, les collectivités à statut particulier et les col-
lectivités d’outre-mer […]. Dans les conditions prévues par la loi, ces collectivités s’administrent librement par des conseils élus et disposent d’un pouvoir réglementaire pour l’exercice de leurs compétences. » Ce principe repose sur trois règles : l’exercice de compétences propres ; par des conseils délibérant élus ; dans le cadre de la légalité contrôlée par l’État.
L’exercice de compétences repose sur ce qu’il est convenu d’appeler la clause générale de compétences, qui s’énonce de la même manière pour chacune des catégories de collectivités : « Le conseil (municipal, général ou régional) règle par ses délibérations les affaires (de la commune, du département ou de la région). » Il s’agit d’une compétence de droit commun dans les affaires qui les concernent.
Il existe aussi une attribution législative de compétences spécifique à chaque échelon de collectivité territoriale, qui complète la clause générale de compétences et en pallie l’imprécision. Ainsi :
• pour les régions : le développement économique et notamment l’aide publique aux entreprises, la gestion des lycées et la formation professionnelle ;
• pour les départements : l’aide sociale, les collèges, la grande majorité du réseau routier ;
• pour les communes : les services publics de proximité, les écoles maternelles et élémentaires.
Pour exercer leurs compétences, les collectivités territoriales votent un budget alimenté par des ressources fiscales propres (les impôts locaux) et des dotations de l’État (ce qui limite leur autonomie financière).
L’organe principal des collectivités territoriales est le conseil élu au suffrage universel direct. Il élit en son sein un organe exécutif (le maire pour les communes, le président du conseil général pour les départements, le président du conseil régional pour les régions). Cet exécutif a pour rôle de préparer et de faire exécuter les délibérations du conseil délibérant, et il a parfois des pouvoirs propres. Ainsi, le maire dispose du pouvoir de police administrative sur le territoire de sa commune.
Il est aussi un agent de L’État ayant compétence pour faire exécuter les lois et les règlements, officier de l’état civil et officier de police judiciaire. Ces collectivités territoriales sont organisées par la loi (pas de pouvoir d’auto-organisation) et ne peuvent agir que dans les limites fixées par la loi et par les règlements administratifs de l’Etat.
Le préfet exerce un contrôle de légalité. Les décisions importantes prises par les collectivités territoriales doivent lui être communiquées et il peut dans les deux mois les déférer au tribunal administratif, à charge pour le juge de les annuler si elles sont illégales. En matière budgétaire, le préfet dispose même du pouvoir de se substituer à la collectivité territoriale qui ne vote pas un budget en équilibre réel (seul le budget de l’État peut être en déficit), après avis de la chambre régionale des comptes.
2. La décentralisation fonctionnelle
La décentralisation fonctionnelle repose sur les établissements publics, qui sont des personnes morales administratives ayant compétence pour gérer une ou plusieurs activités déterminées (principe de spécialité), comme un lycée, une université, voire une entreprise publique (SNCF). Ils sont administrés par un conseil d’administration nommé en partie au moins par la collectivité de rattachement (l’Etat ou une collectivité territoriale) et sont soumis à la tutelle d’un ministre ou du préfet.
Certains établissements publics servent à regrouper les collectivités territoriales, surtout les communes qui sont très nombreuses en France (36 750) : il en est ainsi des établissements publics de coopération intercommunale (syndicats, communautés de communes, d’agglomérations, ou urbaines) qui combinent les décentralisations territoriale et fonctionnelle. Leurs décisions sont également soumises au contrôle de légalité.
Ainsi, non seulement le droit administratif organise l’Administration, mais il encadre aussi son fonctionnement.