L'authenticité des œuvres : Les procédus d'identification et d'authentification des œuvres
Les catalogues de ventes publiques d’œuvres d’art qui accompagnent la présentation des œuvres mises en vente illustrent les différentes formules d’authentification pratiquées.
Extraits de catalogues de ventes publiques
Exemple 1
Jean Dufy (1888-1964), Le Val d’Ajol, 1920
Huile sur toile signée et datée qui figurera dans le volume 2 du catalogue raisonné de l’œuvre de Jean Dufy en préparation par M. Jacques Bailly ; un certificat de M. Jacques Bailly sera remis à l’acquéreur.
Exemple 2
Sam Francis (1923-1994), sans titre, 1984 Monotype et gouache sur papier signé en bas à droite Provenance : Collection particulière, USA
Exemple 3
Isaac Dobrinsky (1891 -1973), L ‘Atelier du peintre Huile sur toile
Un certificat du fils de l’artiste sera remis à l’acquéreur.
Indépendamment de la signature de l’artiste et de l’histoire de l’œuvre (expositions antérieures, appartenance à une collection privée), il existe trois moyens principaux d’authentification d’une œuvre : le certificat d’un proche, en général membre de la famille, la présence dans un éventuel catalogue raisonné et le certificat d’expertise.
Le recours à une attestation d’un proche de l’artiste pour prouver l’authenticité d’une œuvre est très pratiqué et le terme « certificat » employé de façon courante bien qu’il n’ait aucune valeur juridique particulière. Si la personne contactée est un héritier de l’artiste, détenteur des droits moraux, son avis est toutefois très important. En effet en vertu du droit moral à la paternité, il peut s’opposer à l’apposition du nom de l’artiste dont il est l’héritier sur une œuvre qu’il estimerait fausse : obtenir son aval évite ce problème. Dans les autres cas la prudence s’impose, la responsabilité du certifiant étant régie par le droit commun de la responsabilité.
Le catalogue raisonné est un ouvrage rédigé par un auteur qui recense les œuvres d’un artiste. Les catalogues raisonnés sont très importants pour le marché de l’art mais paradoxalement ils ne font l’objet d’aucune réglementation : tout le monde peut en rédiger un et il n’est pas rare que pour un même artiste, deux catalogues coexistent. Sur un plan juridique ils sont considérés en général par les tribunaux comme un recueil d’avis d’auteurs mais pas comme une expertise.
À titre d’exemple, le Wildenstein Institute édite des catalogues raisonnés qu’il intitule : « Catalogue critique ». Il a édité les catalogues de Gauguin, Marquet, Vuillard, Pissarro et s’appuie sur une équipe d’historiens d’art.
Lorsqu’ils sont contactés par le propriétaire d’une œuvre, ils précisent que l’avis qu’ils vont émettre après étude sera un avis d’inclusion ou de non- inclusion dans le catalogue raisonné mais en aucun cas une expertise ou un certificat d’authenticité. Les frais seront des frais de dossier, forfaitaires et non des honoraires d’expertise.
La situation est cependant confuse car la non-inclusion au catalogue raisonné a une incidence certaine sur la valeur de l’œuvre : rejetée du catalogue raisonné, elle sera considérée comme douteuse et subira une décote. C’est pourquoi il n’est pas rare qu’en cas de refus d’inclusion, le propriétaire de l’œuvre intente une action judiciaire. La jurisprudence est partagée : dans certains cas elle a respecté le refus, dans d’autres cas elle l’a infirmé imposant l’insertion. Dans ce dernier cas, le catalogue mentionne : « insertion sur décision judiciaire ».
Le certificat d’expertise est réalisé par un expert généraliste ou spécialiste. L’expert est un professionnel indépendant, rémunéré en honoraires souvent proportionnels à la valeur de l’œuvre expertisée. Certains experts peuvent être salariés de maisons de vente comme Sotheby’s ou Christie’s. Depuis la loi de 2000, le Conseil des ventes peut agréer des experts. Ces experts agréés ont l’obligation de contracter une assurance professionnelle et ne peuvent solliciter leur inscription que dans deux catégories de spécialités. Il existe par ailleurs des listes d’experts judiciaires : une liste nationale d’experts agréés par la Cour de cassation et des listes d’experts devant chaque cour d’appel. Certains experts sont assesseurs de la Commission de conciliation et d’expertise douanière, nommés pour 7 ans.
L’expert engage sa responsabilité lorsqu’il établit un certificat d’authenticité. Cette responsabilité est engagée vis-à-vis de tous les acquéreurs successifs de l’œuvre expertisée.
L’expert est tenu, comme tout conseil, à une obligation contractuelle de moyens.