Les différentes organisations de vente : Les ventes aux enchères publiques
Les ventes aux enchères se caractérisent par une mise en vente ouverte à tous de biens dont la description à été au préalable communiquée. La personne qui dirige les opérations annonce un prix de départ et les acquéreurs potentiels enchérissent oralement, la vente se concluant sur la base de la dernière enchère. On parle traditionnellement de vente à prix « crié », même si les procédés modernes de communication des offres (téléphone par exemple) sont de plus en plus utilisés. Dans ce cas le prix communiqué par téléphone est transmis oralement au public présent afin qu’une surenchère puisse être faite.
Ce mode de vente est très ancien et existe dans tous les pays du monde.
Jusqu’en 2000. seuls les commissaires-priseurs français titulaires d’une charge d’officier ministériel étaient autorisés à organiser en France des ventes publiques aux enchères.
Une loi du 10 juillet 2000 a mis fin à des siècles de monopole. A l’origine de cette loi. une plainte déposée devant la Commission de Bruxelles par la société Sotheby’s qui. ne pouvant exercer en France, accusait le pays de protectionnisme.
Aujourd’hui les commissaires-priseurs ne conservent que le monopole ventes judiciaires, les ventes volontaires étant organisées par des sociétés de forme commerciale (SA. SAS. SARL et aussi SNC après avis du Conseil des ventes du 4 avril 2002) appelées « sociétés de vente volontaire ». Leur activité demeure cependant dans le cadre du droit civil ; ainsi elles ne peuvent pas acheter des objets pour les revendre.
Un Conseil des ventes, créé par la loi de 2000, agrée ces sociétés qui, par- delà leur forme juridique de société commerciale, doivent présenter un certain nombre de garanties de nature essentiellement financière (cautionnement du compte recevant des fonds par exemple, assurance…).
Les grandes sociétés internationales de vente comme Christie’s ou Sotheby’s ont sollicité et obtenu leur agrément auprès du Conseil des ventes et peuvent maintenant organiser officiellement des ventes en France. Certains « anciens » commissaires-priseurs se sont également constitués en société de vente comme Tajan (devenu Tajan SA) ou Cornette de Saint-Cyr (devenu Cornette de Saint-Cyr Maison de vente), d’autres ont préféré rester commissaire-priseur restant alors en charge des seules ventes organisées sur décision judiciaire (ainsi que les ventes du crédit municipal).
Le Conseil des ventes composé de onze membres désignés par le garde des Sceaux fonctionne comme une autorité de régulation qui agrée les sociétés de vente, contrôle et éventuellement sanctionne les manquements déontologiques et depuis peu agrée également les experts.
La loi de 2000 et son décret d’application ont en outre modifié profondément les règles de fonctionnement en se rapprochant des systèmes en vigueur à l’étranger afin de rendre la France plus attractive pour les grandes ventes internationales. Les principales modifications de fonctionnement sont les suivantes.
- Libre fixation de la rémunération de la société de vente : les
frais de vente sont payés par le vendeur et maintenant librement négociables. Avant la réforme, ils étaient fixés par décret. Cette liberté de principe est en fait un peu théorique car la plupart des sociétés de ventes proposent des barèmes difficilement négociables, sauf vente très importante comme celle d’une collection célèbre. Dans ce dernier cas, la concurrence entre maisons pour obtenir la vente est très forte et la négociation possible. L’acheteur paie de son côté des frais également fixés librement par la société et indiqués dans les conditions générales de vente qui figurent dans le catalogue de la vente. La participation aux enchères entraîne l’acceptation de ces frais qui sont définis de façon progressive. La négociation est à l’évidence impossible !
Exemple de frais de vente (extrait des conditions générales d’un catalogue de vente)
Frais à la charge de l’acheteur : Les acheteurs paieront en sus du prix de l’adjudication dit prix marteau les frais suivants dégressifs par tranche et par lot : jusqu’à 100 000 € : 17,5 %, plus TVA soit 20,93 % TTC, au-delà de 100 000 € : 12 %, plus TVA soit 14,35 % TTC.
- Prix de vente minimum : le vendeur peut fixer un prix de vente minimum en-dessous duquel le bien ne peut être vendu. Cette pratique du prix de réserve existait avant mais elle est maintenant clairement mentionnée dans le texte de loi. Le prix minimum est déterminé par le vendeur et doit faire l’objet d’un accord écrit.
- Prix garanti et avance : la principale nouveauté de la loi de 2000 est de permettre au vendeur d’obtenir une garantie de paiement d’une somme minimale fixée avant adjudication. Cette garantie ne peut jouer si le bien n’est pas vendu, à la différence des systèmes anglo-saxons qui le garantissent de façon absolue. La différence entre le prix d’adjudication et le prix garanti sera pris en charge par la société ou par sa compagnie d’assurances en cas de défaillance. La société de vente ne peut en aucun cas devenir propriétaire ou l’acheter pour son compte. Enfin, la loi autorise la société de vente à consentir une avance sur les prix d’adjudication.
La vente est organisée par la société qui a l’obligation d’en organiser la publicité.
Les ventes importantes donnent lieu à édition de catalogues qui mentionnent l’œuvre (titre, taille, technique), l’auteur, l’authentification (par exemple : « œuvre de …, provenance : collection particulière de …, France. Figurera dans le catalogue raisonné de l’œuvre de … actuellement en préparation par Mme Dupont. Un certificat de Mme Dupont en date du …, sera remis à l’acquéreur ») ainsi qu’une évaluation de prix.
La reproduction de photographies des œuvres est soumise au droit commun des reproductions c’est-à-dire : autorisation des détenteurs de droits pour les œuvres récentes et paiement de droits. En effet depuis 2000, seuls les catalogues des ventes judiciaires bénéficient d’une exception et ne sont pas soumis à paiement de droits. Le tribunal de grande instance de Paris a par exemple condamné dans un jugement du 21 mars 2003 une société de vente qui avait reproduit, sur son site Internet annonçant une vente, des dessins d’Hergé sans autorisation des héritiers.
L’adjudication est menée par une personne habilitée à mener les enchères. La liste officielle des sociétés de vente précise le nom des personnes habilitées à diriger les enchères.
Les enchères peuvent être faites oralement, par signe, par téléphone ou par Internet.
L’adjudicataire doit payer le prix pour retirer l’objet acheté. Si tel n’était pas le cas, l’objet peut être remis en vente et l’on parle alors de « revente sur folle enchère ».
L’État dispose depuis 1921 d’un droit de préemption qu’il doit manifester dès que l’adjudication est prononcée. En cas de vente par voie électronique le délai est de quatre heures à compter de la fin de l’adjudication. Un décret de 2001 établit la liste des objets d’art sur lesquels peut porter cette préemption, liste très vaste. L’État dispose ensuite de quinze jours pour confirmer ou abandonner sa préemption. S’il la confirme, il remplace alors l’adjudicataire et paie le prix de l’adjudication au vendeur. Les collectivités publiques disposent du même droit de préemption. Si un prix de réserve fixé par le vendeur n’a pas été atteint et l’objet retiré de la vente, le droit de préemption ne peut être exercé.
Ce droit de préemption a longtemps été exercé pour des objets relevant du patrimoine historique, mais aujourd’hui il est appliqué très largement comme en atteste le nombre important d’objets préemptés dans la vente de la collection d’art d’André Breton en 2004.