Les droits d'auteur
Les droits de propriété intellectuelle reconnus aux auteurs par le droit français sont composés de deux droits patrimoniaux, de plusieurs droits moraux et d’un droit « mixte », le droit de suite, dont l’existence même est aujourd’hui très contestée : certains l’accusent d’avoir fortement contribué aux départs de France des grandes ventes d’art moderne et contemporain.
Les droits patrimoniaux peuvent être vendus (d’où leur nom), à l’inverse des droits moraux par nature inaliénables et conservés par l’artiste. Ne pas les respecter constitue dans tous les cas un acte de contrefaçon puni sur le plan civil (dommages et intérêts à verser à l’auteur victime) et pénal (amende pour le contrefacteur).
Leur propriété est distincte de celle du support matériel de l’œuvre.
Cette dualité, essentielle à la compréhension du régime juridique des œuvres, n’est pas toujours bien comprise par le monde de l’art : l’achat, par exemple d’un statue, objet matériel, est indépendante de l’achat des droits patrimoniaux.
Le CP1 précise (art. L. 122-1) que les droits d’exploitation se composent de deux droits distincts : le droit de représentation et le droit de reproduction. Ils appartiennent exclusivement à l’auteur qui en a le monopole et peut, seul autoriser leur utilisation et leur cession. Le revenu de l’artiste est ainsi assuré.
A h mort de l’auteur ces droits sont transmis à ses héritiers pour une durée de 70 ai us. Passé ce délai, les droits patrimoniaux disparaissent et l’œuvre loi h lie alors dans le domaine public.
La propriété du support matériel est indépendante de celle des droits intellectuels et leur commercialisation suit des règles distinctes. La loi impose eu effet qu’un contrat écrit précise différents points pour qu’il y ait véritablement cession des droits patrimoniaux : en leur absence, seul le support matériel est cédé. Inversement l’achat des droits peut se faire indépendamment de celle du support. Les juges ont récemment appliqué ce principe à I acquéreur des droits d’exploitation d’un film qui n’avait pas la pellicule originale (nécessaire à sa restauration). Il fut obligé de l’acquérir par ailleurs avec beaucoup de difficultés.
La Cour de cassation appliqua ce principe d’autonomie lorsque l’héritier de l’artiste Sonia Delaunay fit don à un musée d’un manteau, considérant que seul l’objet avait été donné.
La distinction entre la représentation et la reproduction d’une œuvre n’est pas toujours facile : comment qualifier, par exemple, l’affichage d’une œuvre sur un écran d’ordinateur ?
Les tribunaux ont tranché en considérant, dans une affaire célèbre jugée en 1996 à Paris, que la numérisation d’une chanson pour sa mise en ligne sur un site Internet portait atteinte au droit de reproduction de l’auteur.
Le droit de représentation a suscité peu de contentieux. À l’inverse, l’exercice du droit de reproduction est au cœur de nombreuses polémiques, comme l illustrent deux affaires jugées le même jour par la Cour de cassation (le 4 juillet 1995). Elles mettaient en cause la société Antenne 2 qui avait diffusé d’une part une émission d’actualité théâtrale, filmée dans le bar- fumoir du théâtre des Champs-Élysées, et d’autre part une émission intitulée Chefs d’œuvres en péril, filmée dans le jardin des Tuileries. La première reproduisait les fresques murales du peintre Vuillard peintes sur If. murs du fumoir, la seconde les sculptures de Maillol placées dans le jardin. Or aucune autorisation n’avait été demandée aux artistes (ou à leurs lien tiers) pour pouvoir les filmer.
La SPADEM (société d’auteurs gestionnaire des droits patrimoniaux des deux artistes) attaqua donc la chaîne pour violation des droits de reproduction et obtint gain de cause : filmer les fresques et les statues était une utilisation non autorisée du droit de reproduction.
Pour des raisons similaires la société Guerlain dut verser des dommages et intérêts aux héritiers des auteurs d’une fresque murale peinte dans les années 1930 sur les murs extérieurs d’un musée (l’ancien musée des Colonies situé Porte Dorée à Paris).
Des photos publicitaires avaient été faites devant le musée (avec la fresque en fond) sans l’autorisation des héritiers. Les artistes étant morts depuis moins de 70 ans, les droits patrimoniaux existaient toujours. Le parfumeur fut condamné.